Après le service de pédiatrie de Bizerte: est ce que la chute des plafonds dans nos hôpitaux est un phénomène inquiétant?

Évidemment que cela ne parait déranger personne!
Dimanche 14 avril 2019, 07h30 du matin: écroulement du plafond dans le 3ème étage du service de pédiatrie de Bizerte. Heureusement qu'il n'y avait aucun patient hospitalisé dans le secteur. Encore un week-end ordinaire dans la maternité de Bizerte. Après l'épidémie des puces pendant l'été 2018, pour laquelle on attend toujours une réponse digne, voilà que le destin nous offre des images dominicales à en couper le souffle de lits de bébés, heureusement vides, gisant sous les décombres de briques et d'asphalte.
Ce qui est choquant n'est pas la chute d'un plafond dans le service de pédiatrie -deuxième incident de ce type dans un service de pédiatrie en moins d'un an, après celui enregistré dans le deuxième étage de l'Hôpital d'enfants l'année dernière le 03 aout 2018-. C'est plutôt le silence morbide qui va suivre de la part de nos dirigeants pour qui tout cela est devenu "normal". On se demande même parfois, à en voir l'étonnement de certains d'entre eux, s'il s'agit là de véritables décideurs publiques ou simplement de princesses qui ne travaillent pas, "mes parents sont mes sponsors"?
Dans un pays qui se respecte, dont les institutions placent la sécurité des patients et la qualité des soins fournis comme valeurs absolues, de telles incidents ne devraient pas avoir lieu. Et si par malheur cela arriverait, ce serait un incident isolé qui ne devrait plus se reproduire.
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Photo prise au service de pédiatrie de Bizerte suite à la chute du plafond - Crédit photo: plusieurs médias -
Photo prise au service de pédiatrie de Bizerte suite à la chute du plafond - Crédit photo: plusieurs médias -
Photo prise au service de pédiatrie de Bizerte suite à la chute du plafond - Crédit photo: plusieurs médias
La réalité de notre situation et l'attitude nonchalante des décideurs du secteur de la santé nous laissent encore dubitatifs dans nos plus simples et légitimes aspirations.
La logique impose qu'on doit apprendre de nos erreurs et dresser immédiatement un inventaire complet de tous les plafonds à haut risque de chute dans nos structures sanitaires, le minimum requis pour préserver la sécurité des patients et du personnel au moins. Toutefois, la réalité de notre situation et l'attitude nonchalante des décideurs du secteur de la santé nous laissent encore dubitatifs dans nos plus simples et légitimes aspirations. Ceci est devenu un phénomène triste de notre quotidien hospitalier, dont la fréquence de survenue ne rivalise qu'avec les visites de marketing politiques de nos dirigeants pour inaugurer d'anciens projets planifiés depuis bien longtemps, mais toutefois présentés comme réponses urgentes aux actuelles crises.
Rappelons nous qu'il s'agit là d'un énième incident dans toute une série d'incidents semblables survenus pendant les dernières années et rapportés par la presse:
1: vidéo et article de presse, 2: article de presse, 3: article de presse, 4: article de presse, 5: article de presse, 6: article de presse.
Points communs entre tous ces incidents? On peut en citer trois:
- Leur survenue dans des centres ou des services hospitalo-universitaires: là où théoriquement on fait de la médecine "de pointe" et là où se forment les générations médicales du futur.
- Le hasard qui, dieu merci, nous a à chaque fois épargné des pertes de vie humaines que ce soit parmi les patients ou le personnel soignant. (à noter quand même la blessure d'une sage-femme dans l'incident de chute de plafond de la maternité de Monastir).
- L'absence de toute commission d'enquête ou d'indignation nationale ou même de débat publique ou de mobilisation sérieuse sur ce phénomène qui reflète l'état vétuste de nos structures de soin, devenu dangereux et pour les patients et pour le personnel.
Est ce que nos dirigeants, si intéressés et si bienveillants, attendent qu'un drame humain à large échelle ce reproduise pour réagir et entamer le débat publique nécessaire avec toutes les parties concernées comme cela s'est fait après le dernier drame de Wassila Bourguiba?
Est ce que nos dirigeants, si intéressés et si bienveillants, attendent qu'un drame humain à large échelle ce reproduise pour réagir et entamer le débat publique nécessaire avec toutes les parties concernées comme cela s'est fait après le dernier drame de Wassila Bourguiba?
Que manque-t-il encore à nos petits anges rongés par la maladie, qui courent le risque de se voir un jour une brique leur tomber directement du ciel sur le visage, là où on est supposés les protéger et les mettre à l'abri?
Avec ces plafonds qui chutent, c'est aussi le plafond des ambitions et espérances de nos jeunes médecins vis à vis d'un avenir digne qui chute aussi, se sentant assez souvent simples spectateurs d'un système en décadence permanente, qui ne leur offre aucune projection respectable dans le futur, tandis que le rêve de l'exode berce les pensées de presque tout un chacun.
Attendons-nous donc à une déclaration publique du ministère qui viendra jouer au pompier, et qui peut être, pour atténuer un peu l'alarmisme de certains, dira qu'il s'agit "juste" d'un "faux" plafond?
Faux plafonds, comme faux dirigeants, faux, faux, et archi-faux..
On se demande parfois ce qui reste de juste dans notre pays...
Crédit photo de couverture: Photo prise dans le service du laboratoire de Charles Nicolle le 03.05.2018 à la suite de la chute du plafond.